Puisqu’il est dans notre habitude de vous narrer des histoires, nous
voulons dire, a lieu d’une fable, une aventure qui est vraie :

Jadis vivait riche gentilhomme qui était fort cortois et joli. Toujours avait un luth, que
toujours il menait lui même. Beaucoup de pain, de vin, de viande avait, et tant
qu’il en fallait.Mais de ne pas avoir de compagnons pour s’ebanoyer en musique,
le blâmaient beaucoup ses amis, et tout le pays avec eux !

Il dit, s’il en trouve quelques bons, qu’il les prendra bien volontiers.
On lui promet qu’on irait quérir les meilleurs qui se rencontre !

Qui sait par quels charmements, en cette froide nuitée hivernale,
Trois ménestrels se retrouvèrent aux pieds du castel d’Icelui.

«Quel est donc ce hutin ? Qui vient chapeler à ma porte ?
Quelles sont ces canailles venues rapiner ? je ne suis point
homme preux et lâcherai sans vergonde mes mâtins sur eux ! »
S’écria messire Guillaume.

Il en estoit un chevelé, qui se nommait Didier, qui, portant nacaires et tambourin,
houspillait là un meschin déconfit ! Le jouvenceau, Dylan, qui sage était, n’osai
son père contredire, et jouait du cistre comme il pouvait: le pauvre à main gauche,
ne pouvant plus qu’un doigt compter ! Puis se trouvait un drôle oreillard, huron,
qui babillait en grattant les cordes d’une citole ! ceulx là l’appelaient Pascal.

«Que nenni !!» crierent-ils en chœur, tremblant de peur ! L’un d’eux lui dit prestement :
«n’ayez point d’effroi pour ce troppelet, nous avons ouï dire que vous vous languissiez
de ne point être accompagnés par quelques gents toubadours !»

Il ne fallut pas bien longtemps pour que le vilain s’apercût qu’ils n’étaient ni fourbes
ni gueux, et leur ouvrit sa porte ! «Bien vaigniez ! Rentrez en droite heure vous réchaudir !
heureux de vous conjouir à entonner une chope ! Ripaillons et s’il vous plait, nous
essaierons suivant quelques chants, ou quelques Bourrées !» Et ainsi passa la nuit
tant que couché fut le soleil ! A la pique du jour nos quatre compains faisait
route entour et s’affairaient déjà à faire se culeter les donzelles !

Tout alla comme l’on vous conte : Et naquit ainsi en chansonnette L’histoire de Rodéo sur Juliette